Docteur Bertrand BAUER
Paralysies et lésions nerveuses isolées de l’épaule
L’innervation des muscles de l’épaule est assurée par les racines C5 et C6 du plexus brachial. Ces nerfs cheminent au contact de l’articulation de l’épaule. L’atteinte isolée de ces nerfs entraîne la paralysie spécifique des muscles qu’ils innervent.Trois nerfs sont fréquemment lésés : le nerf axillaire, le nerf sus-scapulaire, et le nerf thoracique long, à l’origine respectivement d’une paralysie des muscles deltoïde, sus et sous épineux, et grand dentelé.
1. Paralysie isolée du muscle deltoïde lors de l’atteinte du nerf axillaire
Le nerf axillaire est un nerf sensitif et moteur, issu du tronc postéro-supérieur du plexus bachial. Il innerve le muscle deltoïde et le muscle petit rond, il est responsable de la sensibilité cutanée de la face latérale de l’épaule.
Après avoir quitté le plexus brachial, il longe le bord antérieur puis inférieur du muscle sous-scapulaire, avant de longer le bord inférieur de la capsule articulaire. Il traverse ensuite le trou carré de Velpeau délimité par le petit rond, le triceps, le grand rond et l’humérus. Il longe ensuite le col de l’humérus pour cheminer à la face profonde du deltoïde d’arrière en avant.
Son atteinte entraîne une paralysie du muscle deltoïde, du petit rond ainsi qu’une anesthésie du moignon de l’épaule. Outre l’amyotrophie caractéristique, on remarque une paralysie de l’abduction du bras, et à moindre degré de la rotation latérale, auxquelles s’associent une douleur et une perte de sensibilité du moignon de l’épaule. Le diagnostic est avant tout clinique et doit être complété par un électromyogramme (EMG) et une IRM en haute définition, recherchant une atteinte au niveau du trou carré de Velpeau. En effet, le trou carré de Velpeau constitue le point de fixité du nerf et celui-ci subit un étirement lors d’une luxation gléno-humérale, ou une fracture du col chirurgical de l’humérus.
Le traitement comprend la mise au repos et le contrôle à 3 mois d’intervalle de l’EMG. En l’absence de récupération clinique et électrique, on proposera une neurolyse ou une greffe nerveuse en fonction des constatations peropératoires.
2. Paralysie isolée des muscles sus et sous-épineux lors de l’atteinte du nerf sus-scapulaire
Le nerf sus-scapulaire (NSS) provient du tronc supérieur du plexus brachial. Il s’agit d’un nerf essentiellement moteur, pour le muscle sus-épineux et le muscle sous-épineux. Il est aussi sensitif, responsable de l’innervation de la capsule postérieure de l’articulation de l’épaule.
Après avoir quitté le tronc supérieur, le nerf passe sous l’échancrure coracoïdienne, donne l’innervation du muscle sus-épineux, puis passe l’échancrure spino-glénoïdienne et rejoint la face postérieure de l’omoplate, donnant des branches motrices pour le muscle sous-épineux et des branches sensitives pour la capsule articulaire gléno-humérale.
Les mouvements d’abduction répétés que l’on retrouve lors des smashs des volleyeurs peuvent entraîner un étirement du NSS comprimé entre les 2 points fixes que constituent le rachis et l’échancrure coracoïdienne. Un kyste du bourrelet glénoïdien postérieur peut entraîner une compression du NSS au niveau de l’échancrure spino-glénoïdienne.
Le diagnostic initial est souvent difficile chez une sportif en armer-contrer, présentant des douleurs sourdes de l’épaule à recrudescence nocturne. Survient ensuite un tableau de diminution de l’efficacité du geste sportif, s’intégrant dans une tendinopathie de la coiffe. Le déficit moteur, avec amyotrophie des fosses sus et/ou sous-épineuses, avec difficulté d’abduction et de rotation externe, est rarement franc.
Le diagnostic repose sur l’EMG et l’IRM.
Le traitement repose avant tout sur le repos sportif et la rééducation fonctionnelle, éventuellement associés à une corticothérapie per os pendant 5 à 6 jours. Une infiltration d’un dérivé cortisoné est ensuite privilégiée sous contrôle scannographique. La découverte d’un kyste glénoïdien posera l’indication d’une ponction-infiltration. Le traitement arthroscopie est réservé aux formes rebelles et en l’absence de récupération après 3 à 6 mois de traitement médical : débridement arthroscopique d’un kyste glénoïdien, neurolyse avec section du ligament coracoïdien lors d’une compression isolée à l’échancrure coracoïdienne.
3. Paralysie isolée du muscle grand dentelé lors de l’atteinte du nerf thoracique long
Le nerf du grand dentelé ou nerf de Charles Bell naît des branches antérieures des racines C5, C6, C7, passe le plan des scalènes, puis se trouve en situation postérieure au plexus brachial avant de rejoindre la gaine axillaire puis le thorax pour donner l’innervation des différentes digitations du muscle grand dentelé ou serratus antérieur. Le muscle grand dentelé est un muscle respirateur accessoire lorsque la scapula est fixe ; il est protracteur de la scapula, l’empêchant de basculer autour de son axe lors de l’abduction du bras. Le diagnostic repose sur l’association de douleurs et d’une scapula Alta : soulèvement du bord médial de la scapula plus marqué en début d’élévation. La confirmation diagnostique repose sur l’EMG. Le traitement est essentiellement médical, associant repos sportif, rééducation, suivi clinique et contrôle EMG, puisque l’évolution naturelle se fait vers la récupération spontanée en 6 à12 mois. Une prise en charge chirurgicale ne sera pas proposée avant 9 à 12 mois d’évolution. Une neurolyse en regard du bord proximal du chef distal du grand dentelé peut être alors proposée. En l’absence de récupération après plusieurs années, un traitement palliatif est indiqué.
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